On connaissait le cyberpunk, ce futur désabusé rongé par les mégacorpos, la technologie invasive et l’effondrement du lien social. On avait vu surgir avec intérêt le solarpunk, tout en végétal, en utopies douces, en coopératives solaires et en architectures organiques.

Aujourd’hui, j’aimerai m’interroger sur la mouvance Lunarpunk, car c’est une esthétique qui m’intrigue tout particulièrement depuis quelques temps. Avec cet article, j’espère vous emmener avec moi dans de ce genre que j’ai découvert un peu par hasard.

Lunarpunk ?

Tout d’abord, une petite définition s’impose. A première vue, on pourrait naïvement dire que Lunarpunk est le versant nocturne du Solarpunk. Mais je pense que cela va un peu plus loin que ça : là où le Solarpunk mise sur l’utopie collective, la transparence et la lumière comme métaphores du changement, le Lunarpunk préfère l’intime, le magique, le rituel, le secret, etc. Le tout sous une Lune éternelle. D’ailleurs, une analyse de la différence entre Solarpunk et Lunarpunk peut être trouvée dans cet article.

Mais pour résumer grossièrement, le Lunarpunk est un courant qui :

  • valorise l’invisible, l’émotionnel, l’ésotérique,
  • donne une place centrale à la résilience intérieure,
  • croit dans les petits cercles, les marges, les traditions perdues ou inventées,
  • pense le changement structurel en mettant en avant l’individualité.

Esthétiquement, on y trouve de la brume, des champignons, des lanternes, du tarot, de l’herboristerie, des runes, de la sororité, des chants, des mondes souterrains, des étoiles brillantes de mille feux, et la Lune bien sûr.
Politiquement, c’est un courant qui se méfie des grands récits et qui croit en la puissance des microcosmes, du fait de prendre soin de sa communauté, de sa sororité…

Bien sûr, il ne s’agit pas de définir de manière stricte et absolue cette mouvance : comme tout mouvement de contre-culture, le Lunarpunk est protéiforme, et toujours en changement. Il est difficile d’étiqueter une œuvre comme Lunarpunk de manière définitive (cela sera d’ailleurs antinomique à son esprit à mon sens). Je n’en donne donc que quelques éléments constitutifs en espérant vous donner une meilleure idée de ce à quoi cela pourrait ressembler.

Jouer Lunarpunk

Je n’ai pas la connaissance de beaucoup de JDR qui s’inscrivent dans cette mouvance de manière affirmée. Mais si vous en connaissez, n’hésitez pas à nous le signaler dans les commentaires. Je lorgne en ce moment sur Notre Crépuscule de Melville, mais je ne sais pas si elle se revendique du Lunarpunk. Aori également (peut être ?). Magie de Minuit surement, à postériori.

Quoiqu’il en soit, je me propose de lister quelques pistes pour jouer Lunarpunk, car il ne s’agit pas seulement de changer l’esthétique des décors. Il s’agit surtout d’adopter une posture de jeu différente : lente, contemplative, attentive aux liens entre personnes et à l’étrange. Voici donc quelques éléments à inclure dans vos parties si vous souhaitez vous imprégner de cette esthétique, quelque soit le jeu que vous choisissez :

Créer des rituels

Avant chaque voyage, les PJ préparent un rituel : dessin de runes, offrande à la lune, prière aux ancêtres, chant choral, etc. Ces moments ne doivent servir à rien mécaniquement (j’y tiens !), mais permettent de donner du sens aux actions du groupe.

Protéger au lieu de détruire

Les quêtes ne doivent pas consister à tuer, mais à restaurer et à transmettre, par exemple, guérir une source corrompue, faire renaître une légende oubliée, transmettre une mémoire orale menacée, soigner des bêtes légendaires abimées par les Hommes…

Habiter les marges

Vos lieux de jeu sont des villages brumeux, des cités enfouies sous des forêts de champignons phosphorescents, des bibliothèques abandonnées que les rêves protègent. Les habitants de ces lieux ont forcément des vies très différentes des citadins : explorez leur quotidien et leurs particularités.

Valoriser les émotions

Autorisez les joueurs à incarner pleinement la tristesse, le doute, le deuil, le soulagement, l’espoir. Mettez en scène la guérison émotionnelle comme enjeu narratif.

Abandonner les solutions simples

Les ennemis ne sont pas « le mal », mais souvent d’anciens alliés, ou des êtres en souffrance. C’est là que la notion de Clair-Obscur devient centrale et que les dilemmes moraux s’imposent.

Et donc… Arcana

Vous l’avez surement vu venir… J’ai découvert la mouvance Lunarpunk en jouant à Arcana (Merci à Crystal pour la découverte <3 ). Alors, évidemment, Arcana n’a pas été écrit dans l’optique de s’inscrire dans ce genre précisément. Le jeu ne s’en revendique nullement. Et pourtant, on peut y voir pas mal d’accroches similaires.

Bien sûr, il y a le canon esthétique : un ciel sans soleil dont la couleur oscille au gré des étoiles, des Enfants (les Divinités de l’univers) qui marchent parmi les mortels ou qui ont disparu, les Arca (la magie) qui infusent chaque chose et chaque être et qui se déclenchent avec les émotions, etc.

Mais il y a aussi les thèmes : la recherche de son identité, l’importance des Liens et des Sacrifices, la poésie et les dilemmes moraux, la sororité que forme la Portée des PJ, etc.

Conclusion

J’espère qu’avec cet article, je vous ai donné envie de découvrir ce genre. C’est un monde que je suis actuellement en train d’explorer et je n’ai aucun doute sur le fait que je vais trouver des œuvres incroyables. Je vous invite tout comme moi à voguer sous la Lune…

Catégories : AnalysesLe Blog

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